dans le jardin mouillé
M'asseoir dans le jardin entre deux averses, m'emplir de cette odeur de terre mouillée et tendre l'oreille pour entendre le froissement du pétale qui se déplie. Etre là, avec mes soucis, mes peines, certes, mais être, après tout, en paix. Pouvoir sortir dans la rue sans recevoir une balle perdue, pouvoir dire ce que je pense sans me faire jeter en prison, pouvoir penser à l'avenir, simplement, en me disant tout ça. Pas de guerre civile ici, pas de tsunami qui emporte tout. Je me souviens d'un petit, tout petit tremblement de terre qui ébranla notre maison il y a quelques années. Comme un énorme camion fou dévalant la rue, un grondement menaçant de quelques dizaines de secondes, le temps de prendre mon bébé dans les bras, d'appeler les grands en leur disant de sortir tout de suite dans le jardin, c'était déjà fini. Sans conséquence autre qu'un carreau fêlé. Alors dans mon jardin mouillé, assise sur la mousse des vieilles pierres je pense à tous ces inconnus qui n'ont pas ma chance et qui pleurent aujourd'hui.