Dessiner partout, dessiner tout le temps
Dessiner dans le confort douillet d'un atelier ou d'un salon, tasse de thé et carré de chocolat, petite musique douce dans les oreilles et chien couché à nos pieds... oui, c'est bien confortable, mais le dessin "de terrain", le dessin dehors, sur une marche ou un trottoir, en pleine forêt, en pleine rue, en plein marché, en plein nulle part, avec trop de vent ou pas assez de soleil, le bruit, le monde, la vie autour de soi, c'est autre chose. Choisir son modèle, n'importe lequel, et s'installer, et plonger dans une bulle parfaite. Le monde, alors, peut bien s'arrêter de tourner, pas grave, on l'a consigné là, dans le carnet, et on s'en fiche si ce n'est pas un chef d'oeuvre, ce n'est justement pas le but. Le but, le seul but, est de poser là l'instant en quelques coups de crayon, de le déposer tout entier sur la page pour l'emporter avec soi, pour emporter la magie de cette étincelle-là, de cette seconde qui ne reviendra pas. Vous pouvez prendre des centaines de photos d'un lieu, d'un moment, et même ne rien regarder qu'à travers l'objectif de votre appareil ; il n'en restera que quelques pixels sur un écran. Faites un croquis, un seul, et vous verrez qu'en même temps que les formes que vous dessinez, votre mémoire enregistrera tous les sons, tous les parfums, l'ambiance, et même l'humidité de la marche sur laquelle vous vous asseyez, et même le parfum du foin coupé, et même... tout. Alors dessinez, partout, tout le temps. Ne craignez pas le regard du passant, il est toujours bienveillant, ni votre propre regard, il est toujours trop exigeant. Dessinez pour le plaisir, pour le bonheur, et vous m'en direz des nouvelles...